Face au nombre important de métiers en pénurie, comment orienter les jeunes vers des filières scientifiques et techniques ? Le Parlement des Animateurs, réuni à Tournai le 16 mars dernier, a tenté d’apporter des réponses à cette question cruciale pour l’avenir de notre pays.
Près d’une quarantaine d’animateurs du MCC, venant principalement de la région du Hainaut occidental mais également d’autres coins de Wallonie ainsi que de Bruxelles, se sont retrouvés ce samedi 16 mars à l’Espace Wallonie picarde à Kain pour venir débattre, dans le cadre d’un Parlement des animateurs, de la thématique portant sur
l’adéquation la meilleure possible entre les formations techniques et professionnelles assurées par le monde de l’enseignement technique et professionnel et les besoins du monde de l’entreprise.
Force est de constater, au vu de ce qui se passe tant en Région wallonne qu’à Bruxelles, que cette thématique est cruciale et cardinale face aux fermetures, restructurations voire délocalisations touchant aussi bien les petites, moyennes ou grandes entreprises avec les conséquences désastreuses sur le plan humain, social et économique que cela entraîne.
Face à pareille situation et face à une concurrence de plus en plus grande, les chefs d’entreprise se doivent de pouvoir compter sur un personnel qui soit le mieux formé possible et qui puisse apporter ainsi une plus-value essentielle au bon fonctionnement, au dynamisme et au rayonnement de l’entreprise vers l’extérieur.
Pour pouvoir en débattre, le MCC avait invité des orateurs qui, en tant qu’acteurs de terrain privilégiés, ont pu, dans le cadre de leur exposé introductif et sur base de données dont ils disposaient, émettre également des considérations personnelles quant à la politique à mener sur cette thématique face à la situation telle qu’elle existe aujourd’hui.
Les orateurs invités étaient Laura Beltrame, conseillère du département Emploi-Formation de l’UWE et représentante patronale au comité de gestion du Forem ; Michel Foucart, fondateur et président du groupe Technord ; Xavier Robben, directeur de l’Institut technique libre de Ath et Patrick Demeulenaere, directeur du département technologie informatique et électromécanique de l’HelHa (Haute Ecole Louvain en Hainaut), site Don Bosco.
S’exprimant à titre personnel, ils ont, sur base de constats qu’ils ont dressés ou à l’appui de données se retrouvant dans l’une ou l’autre étude dont ils ont fait mention, faire part de certaines pistes à explorer qui pourraient être suivies.
Nous nous proposons, tant le débat entre orateurs invités et participants a été très riche, de reprendre, sur base des documents qu’ils nous ont présentés en slideshow, les éléments essentiels qui ont alimenté cette rencontre-débat.
Des constats
Au niveau du monde de l’entreprise
80% de l’emploi exercé en Belgique nécessite des travailleurs moyennement et hautement qualifiés tandis que 80% des demandeurs d’emploi sont faiblement ou moyennement qualifiés (cf étude BNB, sept 2012)
½ des entreprises ne sont pas conscientes qu’à l’avenir elles auront des problèmes de recrutement (cf étude Federgon, mars 2012)
les entreprises pensent de plus en plus en termes de compétences plutôt qu’en termes de diplômes et elles recrutent via des candidatures spontanées, en direct et par intérim (cf étude Federgon, mars 2012)
en raison des pénuries en matière de recrutement, 25% des entreprises ont externalisé et 30% envisagent de cesser une partie de leurs activités (cf étude Federgon, mars 2012)
les postes les plus difficiles à pourvoir : techniciens (maintenance, production, …), ouvriers qualifiés (soudeurs, maçons, électriciens, ..), ouvriers non qualifiés (cf étude Manpower, 2011)
les raisons des difficultés en matière de pénurie de talents (10% : manque de compétences sociales, 20% : salaire proposé en inadéquation avec les attentes du candidat, 21% : manque de candidats, 36% : manque d’expérience, 39% : manque de compétences techniques) (cf étude Manpower, 2011)
les professions les plus attrayantes sont liées au salaire proposé (cf étude Manpower, 2011)
Au niveau du monde de l’enseignement
méconnaissance d’un trop grand nombre d’élèves sur ce qu’offre l’enseignement technique et professionnel
image parfois encore trop stéréotypée voire négative à l’égard de l’enseignement technique et professionnel
Des remèdes/pistes à explorer
Au niveau du monde de l’entreprise
investissements immatériels majeurs à soutenir et à encourager encore plus, à savoir la formation continue ainsi que l’innovation et la créativité
former les demandeurs d’emploi en priorité dans les métiers en pénurie et faire en sorte de prévoir d’augmenter dès lors les classes dans le secondaire pour ces mêmes métiers
orienter les jeunes vers les filières scientifiques et techniques, sinon la pénurie en ce domaine continuera à être structurelle. Pour ce faire, nécessité d’analyser le choix d’orientation des jeunes et de leur entourage pendant leur parcours scolaire
éviter une trop grande bureaucratisation des différents outils mis en place
essayer de trouver des formules, secteur par secteur d’activités, pour faire en sorte de diminuer le coût du travail
Au niveau du monde de l’enseignement
travail de collaboration avec les différentes écoles d’une même région en recourant à des soirées d’information communes, des présentations voire des journées pédagogiques communes
travail sur l’image de marque de l’école afin de combattre une certaine image stéréotypée voire négative qu’a encore chez certains l’enseignement technique et professionnel
confronter le plus rapidement possible les étudiants de l’enseignement technique et professionnel aux réalités de la profession par des stages en entreprises et le développement de l’alternance
travail en collaboration avec l’IPIEQ (Instance de pilotage interréseaux de l’enseignement qualifiant) avec pour objectif le redéploiement plus efficient de l’offre d’enseignement qualifiant dans une perspective de développement régional. Pour ce faire, il convient de mettre en place des incitants aux écoles pour développer des actions visant à optimiser l’offre de formation en phase avec les tendances de développement économique sous-régionales et régionales
mise en place de la CUAA (certification par unités d’acquis d’apprentissage) dans le but de valoriser les acquis plutôt que de sanctionner les échecs
importance à accorder aux CTA (Centres de technologies avancées)
stages/recyclages de longue durée pour les enseignants
accès des hautes écoles techniques aux centres de compétences
financement éventuel des hautes écoles techniques en enveloppe fermée
Compte rendu : Pascal Duchenne